C'est une pensée effrayante que Judas reçoive Notre Seigneur dans l'Eucharistie, mais c'est aussi une pensée extraordinaire que Jésus veuille se donner à lui en sachant à quel point il était indigne de le recevoir. Donnerions-nous un repas spécial à quelqu'un dont nous savons - et Jésus savait - qu'il allait nous trahir ? Laverions-nous les pieds de quelqu'un qui utiliserait ces mêmes pieds, quelques minutes plus tard, pour sortir et conduire des soldats à notre arrestation ? Accepterions-nous le baiser de quelqu'un alors que nous savons que ce baiser est absolument faux et perfide ?
Mais Jésus a fait tout cela pour plusieurs raisons. D'abord pour vivre ce qu'il nous a enseigné : aimer nos ennemis, faire du bien à ceux qui nous persécutent, leur tendre la joue quitte à les gifler. Et aussi parce qu'à chaque instant, jusqu'au dernier souffle de Judas, Jésus essaie de l'appeler à la conversion. C'est cela l'amour de Jésus. Il nous offre toujours une autre chance.
Nous ne devons pas augmenter les blessures du Christ en le recevant indignement. Oui, Notre Seigneur nous l'a dit : "Ce ne sont pas les personnes en bonne santé qui ont besoin d'un médecin, mais les malades.. Il était prêt à manger dans les maisons de ceux qui étaient considérés comme des pécheurs et des exclus. Mais l'Esprit Saint a aussi voulu nous donner ces paroles de saint Paul : "Ainsi, quiconque mange le pain et boit la coupe du Seigneur indignement se rend coupable du corps et du sang du Seigneur". (1 Cor 11, 27). Ce soir, nous célébrons précisément ce don, le corps et le sang du Christ. Quel plus grand don aurait-il pu nous faire ? Il ne s'est pas contenté de partager notre humanité en prenant un corps et en devenant homme. Il a voulu entrer dans l'humanité de chaque homme et de chaque femme. Il ne lui suffisait pas d'être dans un seul corps. Il a trouvé le moyen d'être dans chacun de nos corps en le recevant dans la communion. C'est pourquoi l'évangélisation est si importante : pour que de plus en plus de personnes puissent recevoir Jésus dans l'Eucharistie et réaliser ainsi son désir de venir à elles.
Recevoir la communion sans en être digne, en sachant que nous sommes en état de péché grave, c'est comme le baiser de Judas. Mais lorsque nous trahissons, que nous bavardons et que nous pensons du mal des autres, c'est un peu comme le baiser de Judas. Lorsque nous sourions aux gens et leur disons que nous sommes beaux, tout en pensant du mal d'eux ou en disant du mal d'eux derrière leur dos, c'est le baiser de Judas. Au contraire, nous pouvons imiter le Christ en aimant ceux qui nous traitent mal, en leur tendant la main, en espérant et en priant pour qu'ils changent, en cherchant à les convertir.